Au moment où nous étions réunis à l’église, ce samedi soir-là de mars, le pays tout entier apprenait que, dès le lendemain, en raison de la propagation de l’épidémie de coronavirus, les offices publics ne seraient plus autorisés. Personne n’imaginait alors que, durant plus de deux mois, pas même pour les fêtes pascales, plus aucun office ne pourrait être célébré publiquement. L’épidémie, que nous supposions anodine, nous a pris de court. Que nous le voulions ou non, il a fallu s’y résoudre.
Chacun a probablement plus ou moins bien vécu tant cette longue et inédite période de confinement que de ne plus pouvoir se réunir régulièrement avec d’autres à l’église. Les familles, dont un proche est mort, l’ont particulièrement vécu de façon douloureuse, même si, fort heureusement, nous n’avons pas été empêchés de prier ensemble, près de la tombe, et d’y puiser le courage et l’espérance nécessaires pour continuer à vivre et aller de l’avant, envers et contre tout.
Si, pour beaucoup, cette période a été difficile et ne sera pas sans conséquences, que l’on mesure à peine, pour le moment, elle a, plus positivement, comme interrogé la qualité de notre foi et de notre relation au Seigneur. Car s’il est présent au plus haut point dans la messe, où nous le recevons lui-même, il n’est pas moins présent là où quelques-uns sont réunis en son nom. Ce n’est pas parce que la messe ne peut plus être célébrée, même si elle est la source de la vie du chrétien, que le Seigneur est moins là ou qu’il est carrément absent. Le confinement, pas plus que les portes verrouillées du lieu où ses disciples s’étaient réfugiés après sa mort, n’empêche Jésus de venir et d’être au milieu de nous !
En d’autres termes, avons-nous vécu cette période résignés, désolés qu’il n’y ait plus de messes, ou a-t-elle, au contraire, renforcé notre certitude que le Seigneur était là, au milieu de nous ? Avons-nous vivoté ou, au contraire, persévéré dans la prière et trouvé en elle un stimulant qui nous a davantage donné soif de l’eau de la source dont nous étions privés ?
Si nous sommes sortis de notre confinement, la traversée, elle, n’est pas tout à fait achevée. Nous sommes encore à distance du rivage. L’épidémie n’est pas totalement derrière nous. Lorsque les offices reprendront à l’église, les directives assez strictes, auxquelles nous devrons nous soumettre et nous habituer, quoi qu’on en pense et, sans doute, pour quelque temps, ne manqueront pas de nous le rappeler. Ne les appliquons pas à contrecœur ! Considérons-les plutôt comme une aide pour préserver notre santé et celle des autres. Mais, surtout, alors que nous avons de nouveau accès à la source, ne les laissons pas nous enlever la joie de pouvoir nous réunir, la vraie joie qui nous vient du Seigneur, réellement présent dans le sacrement de l’Eucharistie pour que nous ayons la vie en nous, la vie plus forte que le mal sous toutes ses formes qui nous menace tant et sans cesse !